Ecologie et sécurité : les nouveaux défis de l’éclairage urbain

 

Assurer la sécurité publique et routière, développer l’attractivité urbaine, engager la transition énergétique… Fruit d’une longue histoire, indissociable du développement des villes et des avancées technologiques, l’éclairage public fait face aujourd’hui à de nouveaux défis.

Au Moyen-Âge, les villes européennes baignent quasiment dans l’obscurité. On utilise des flambeaux, des lanternes ou des « feux » pour se déplacer, éclairer les portes de ville, les porches et le sommet de tours… Durant plusieurs siècles, l’éclairage des rues repose essentiellement sur les « chandelles ardentes » que les pouvoirs publics recommandent de placer aux fenêtres des maisons, « afin de déjouer les entreprises des malfaiteurs », des hardes de brigands sévissant à intervalles réguliers dans la ville. Les premières préoccupations sont donc sécuritaires.

C’est d’ailleurs sous l’impulsion du lieutenant général de police Nicolas de la Reynie que va naître l’éclairage public en France, en 1667. A cette date, apparaissent en effet les premières lanternes à bougie marquées du blason de la royauté. Près de 3 000 lanternes fixes seront ainsi rapidement installées pour éclairer les rues de Paris. Un usage qui se généralise ensuite à toutes les villes de France.

En 1729, on compte près de 6 000 lanternes à Paris, dont il faut couper la mèche charbonnée toutes les heures. En 1766, les lanternes cèdent la place aux réverbères à huile et en 1788, l’huile de tripes est remplacée par celle de colza, à la flamme plus blanche et moins nauséabonde.

De l’huile à l’électricité en passant par le gaz

La découverte du gaz d’éclairage en 1791 va marquer un tournant et à partir des années 1830, la substitution va s’engager. En 1855, le préfet Haussmann crée la « Compagnie parisienne d’éclairage et de chauffage par le gaz ». En ce milieu du XIX e siècle , l a révolution industrielle, ainsi que le développement des villes et des échanges, rendent en effet nécessaires l’extension et la gestion publique des éclairages. Les objectifs sont alors de sécuriser les espaces urbains et de permettre l’accroissement de la circulation, mais aussi de mettre en valeur les sites les plus prestigieux de la ville.

Ces besoins vont s’affirmer de plus en plus, d’autant qu’une nouvelle innovation technologique va accélérer le processus : l’arrivée de l’électricité. Après l’invention des premiers luminaires à arc électrique en 1840, des premiers essais sont effectués place de la Concorde. Mais ce n’est qu’en 1878, lors de l’Exposition universelle de Paris, que les lampes à arc électrique font vraiment leur apparition sur l’avenue de l’Opéra, les Halles et la place de la Bastille, créant pour la première fois des illuminations urbaines spectaculaires.

A partir de 1879, date de l’invention de l’ampoule électrique à incandescence par Edison, l’électricité va définitivement emporter la mise, révolutionnant en profondeur l’éclairage et l’expérience nocturne des villes. Les lampes incandescentes équiperont ainsi la plupart des luminaires de la ville de Paris de 1900 à 1960, avant d’être remplacées par les lampes à décharge. Parallèlement, les architectes utilisent les effets de la lumière artificielle pour magnifier les belles verrières des grands magasins, des cinémas ou des pavillons d’exposition.

Les temps modernes

A partir des années 1950, le développement de l’automobile va avoir un impact profond sur l’éclairage public : Renault, Peugeot et Citroën se partagent alors les deux tiers du marché. La lumière urbaine doit désormais permettre aux usagers de la voie publique, automobilistes et piétons, d’avoir une visibilité suffisante pour circuler de nuit en toute sécurité et la régulation de la circulation est renforcée par le développement des feux tricolores. Dans les années 1980, l’éclairage public va prendre également une autre dimension avec l’apparition de « l’urbanisme lumière » et le développement du métier de « concepteur lumière » . Il s’agit de dépasser la vision seulement fonctionnelle de l’éclairage pour adopter une perspective plus large et plus qualitative, centrée sur le confort et le bien-être des usagers. De nombreuses grandes villes du monde se dotent ainsi d’un « plan lumière » pour créer une véritable mise en scène lumineuse de leur ville et donner une identité nocturne à leurs quartiers.

A partir des années 2000, la démocratisation des LEDs, technologie inventée par Nick Holonyak, ingénieur de General Electric, est venue à nouveau révolutionner l’éclairage public. Ces « diodes électroluminescentes » ont une durée de vie plus longue et consomment moins d’énergie que les ampoules traditionnelles, tout en délivrant une lumière plus esthétique, dont la couleur peut varier quasiment à l’infini . Leur déploiement permet de réaliser des économies d’énergie et de mieux réguler les points lumineux de la ville, mais aussi de mettre en lumière de manière esthétique le patrimoine architectural. Autre atout décisif, les LEDs sont capables de transmettre des données dans un écosystème de services connectés : il devient ainsi possible de « greffer » au réseau d’éclairage urbain des services comme la signalisation routière, la recharge des véhicules électriques, la vidéoprotection ou l’information sur la qualité de l’air .

L’écologie : la nouvelle priorité des villes

La question écologique est désormais au cœur des problématiques des collectivités, qui doivent impérativement réduire leur facture énergétique et leur empreinte carbone. Selon l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), l’éclairage public représente en effet en moyenne 41 % de la consommation d’électricité des collectivités, 16 % de leurs consommations toutes énergies confondues et 37 % de leur facture d’électricité.

Les villes doivent donc trouver des solutions pour répondre à ces nouvelles exigences. Pour cela elles disposent de nouvelles technologies plus efficaces et moins énergivores. Ainsi les nouvelles technologies ne sont « pas une fin en soi », comme le souligne la société Citelum, spécialisée dans l’éclairage public. Elles sont plutôt un moyen pour aider les villes à créer de la valeur et à améliorer le bien-être des citoyens. L’entreprise a en effet choisi d’intégrer toute une gamme de technologies et de services associés (illuminations artistiques, signalisation lumineuse tricolore, radars de feux et de vitesse, vidéoprotection, stationnement intelligent, bornes de recharge de véhicules électriques, Wi-Fi, etc.), qui permet aux villes de répondre aux nouveaux défis de l’urbanisme et devenir « plus sûres, plus attractives et plus durables ».

L’urgence est donc à la modernisation des installations . Aujourd’hui en France, selon Citelum, « près de la moitié des installations d’éclairage sont obsolètes et énergivores. Leur rénovation permettrait aux villes de réduire leur consommation d’électricité de 50 % à 75 % ». Dans le cadre des contrats signés avec plus de 1 000 villes dans 14 pays du monde, en Europe et en Amérique, la société française n’hésite d’ailleurs pas à s’engager sur des objectifs chiffrés.

Grâce à l’installation de capteurs de présence et de luminosité, l’éclairage des luminaires s’adapte également en fonction de l’environnement et des situations… Et grâce à la télégestion, les villes peuvent superviser à distance les points lumineux, piloter l’allumage et l’intensité de l’éclairage, gérer l’exploitation et la maintenance en temps réel, et contrôler elles-mêmes les résultats obtenus en matière de performance énergétique. La plateforme Muse, développée par Citelum, a ainsi été adoptée par de nombreuses villes.

Les nouvelles technologies permettent aussi aujourd’hui de connecter au réseau d’éclairage de nouveaux services pour piloter la mobilité urbaine dans le sens de la transition énergétique : bornes de recharge de véhicules électriques, informations des usagers via des applications mobiles sur la circulation, les horaires des transports en commun, les places de parking disponibles… Elles peuvent également être utilisées pour améliorer la qualité de l’air ou réduire les nuisances sonores grâce à l’installation de capteurs de pollution et de bruit. C’est la nouvelle ère de l’éclairage intelligent.

Bertrand PONCE

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